Plongée dans le Belfast populaire.
À 17 ans, j’ai eu la chance de participer à une semaine de rencontre entre jeunes Européen.ne.s. Parmi les jeunes présent.e.s, nous avions particulièrement accroché avec un groupe d’Irlandais.e.s de Belfast.
La rencontre se faisant, malheureusement pour nous 🙄, en Belgique, iels étaient étonné.e.s de voir les gens prendre des verres en terrasse : « Impossible chez nous à cause des bombes ! » nous disaient-ils. On était en 1988 et le conflit était encore vif entre les deux communautés. Pourtant ces jeunes catholiques et protestants semblaient bien s’entendre. Je m’interroge aujourd’hui sur ma pauvre conscience politique de l’époque 🙄
Évidemment, on connaissait la situation à Belfast, popularisée par la chanson de U2 (et apprise dans nos cours d’anglais de surcroît). Évidemment, nous avons vaguement discuté de ce conflit avec ces jeunes Irlandais.e.s. Mais je pense que je ne percevais pas vraiment la gravité de la situation. Quant à iels, iels avaient sans doute trop de pudeur pour nous en dire plus…
Ce n’est qu’aujourd’hui, en visitant les quartiers catholiques et protestants de Belfast que je mesure l’immense gouffre qui séparait nos vies de jeunes ados. De nos jours, près de 30 ans après les accords de Belfast, la paix est revenue. Néanmoins, en traversant les quartiers catholiques et protestants, on sent toujours les cicatrices du conflit. Plus que tout, la désolation économique semble encore frapper et ça fait vraiment mal aux tripes. On se dit que ces « deux frères ennemis » avaient certainement plus de points communs qu’ils ne le pensaient, ou en tout cas qu’ils se sont trompés d’ennemis.
En traversant le quartier catholique, on entre en terre de résistance. Partout, des appels à la solidarité envers le peuple palestinien. Entre opprimé.e.s, on se comprend 😞 Beaucoup de mémoriaux pour les martyrs, aussi beaucoup de photos de victimes ou de plaques commémoratives sur leur ancienne résidence.
Pour passer, du côté protestant, on traverse une zone « neutre », patrouillée par l’armée britannique au temps du conflit. Aujourd’hui, le mur qui longe cette zone est appelé le mur de la paix et les touristes (dont nous 😉) viennent y écrire un message. C’est assez étrange, car on se rend compte que les deux communautés restent encore fort cloisonnées. D’ailleurs, les portes, qui séparent les quartiers, sont toujours fermées tous les soirs par la police… Ça rassure la population, parait-il. À mon sens, ça donne aussi la mesure du traumatisme vécu.
Le quartier protestant m’est, il faut bien l’avouer, nettement moins sympathique. Ici, l’accent est mis sur la résistance militaire, sur l’ennemi assassin qu’il a fallu combattre, sur la glorification de la royauté et de l’État britannique. On y sent moins la solidarité et la volonté de paix. Mais bon, qui suis-je pour juger ? Je sors, vous l’avez compris, profondément bouleversée par cette « visite ». Touchée par l’injustice qui a causé tant de morts… et qui, malheureusement, en cause encore aujourd’hui, ailleurs dans le monde. Bon, je ne vais pas vous saper le moral plus longtemps 😉
On quitte Belfast pour Dublin. Autre ville, autre ambiance… Ce soir, on se plonge dans le trépident quartier de Temple Bar qui nous rappelle que le peuple irlandais, c’est aussi un sens de la fête hors du commun 🤩
Consultez la map reprenant notre itinéraire entre Clonard et Shankill (chemin des fresques).